Suite à différents témoignages et constats, ce mardi 5 juin 2018 les collectifs pour la Régularisation des Sans-Papiers 28 et Eure et Loir Terre d’Accueil adressent le courrier ci-après aux responsables du Conseil départemental, de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE), à Mme la préfète, Mmes les juges des enfants, M. le Procureur de la République, à l’Unité départementale de la Concurrence et de la Consommation et de la Répression des Fraudes, à M. le Défenseur des droits, à l’Hôtel Métropole.
Nous reviendrons vers vous dans le courant de la semaine pour une mobilisation la semaine prochaine (sans doute mercredi 13 juin en fin d’après-midi)
Courrier Hôtel Métropole
Chartres, le 5 juin 2018
Madame, Monsieur, Nous vous avons alertés lors de précédentes rencontres de situations inacceptables à l’hôtel Métropole. Cet hôtel héberge de jeunes mineurs isolés étrangers et d’autres publics en situation de précarité.
Aujourd’hui, les témoignages s’accumulent autour d’une situation de plus en plus grave. Nous avons pu constater les faits suivants : * des mineurs sont laissés à la rue alors qu’ils sont censés être hébergés à l’hôtel. Lundi 28 mai à 22h30, la gérante de l’hôtel a refusé de laisser entrer trois mineurs isolés étrangers résidents de l’hôtel, sous prétexte qu’ils étaient en retard. Ils ont dormi dehors, à la rue, alors qu’ils sont mineurs et reconnus comme tels par l’Aide Sociale à l’Enfance. * des faits de violence physique envers les mineurs isolés et les personnes précaires de l’hôtel. Jeudi 31 mai, un jeune mineur isolé de 14 ans a été victime d’une agression physique de la part du frère de la gérante, alors qu’il demandait de pouvoir prendre son déjeuner. Ces faits vont faire l’objet d’une plainte. Cet homme avait auparavant menacé de violence physique d’autres jeunes mineurs de l’hôtel. Un mineur a été témoin de coups portés par ce même homme sur une autre personne hébergée à l’hôtel. Des témoignages nombreux et concordants indiquent d’autres mauvais traitements : * des problèmes d’hygiène. Les jeunes ont des accès sporadiques aux produits d’hygiène (savon, dentifrice), et doivent aller les réclamer à l’ASE car la gérante ne leur en distribue pas régulièrement. L’accès aux douches et lavabos est contrôlé et soumis à autorisation. Les draps ne semblent pas changés entre deux occupants, et peuvent rester jusqu’à trois mois en place sans être lavés. La vaisselle dans laquelle sont servis les repas est sale. La nourriture servie est tout le temps la même (riz poulet), pas cuite, resservie pendant parfois deux jours de suite, et parfois avariée. * les mineurs de l’hôtel ont interdiction de se rendre dans la chambre des autres, de discuter ensemble dans l’enceinte de l’hôtel, sauf à aller dehors (même en hiver), sous peine de sanction et de menaces. Or aucun espace de convivialité n’existe dans l’hôtel. Ils ne peuvent même pas se retrouver lors des repas car ils ont obligation de les prendre dans leurs chambres. La gérante invoque régulièrement le règlement intérieur de l’hôtel. Nous ne mettons pas en cause la nécessité d’un règlement intérieur. Encore faut-il qu’il soit en cohérence avec les droits fondamentaux de toute personne. Or ces règles imposées aux jeunes n’ont d’autre conséquence que de les intimider et de les isoler au point que certains n’osent plus sortir de l’hôtel. * les jeunes sont victimes d’injures et menaces régulières de la part du personnel de l’hôtel : à la moindre demande, les jeunes peuvent s’entendre dire « je suis chez moi ici, si tu n’es pas content tu dégages », ou des « casse toi », « dégage » … Un mineur qui avait mal à la tête a demandé à la gérante un comprimé de doliprane. Celle ci lui a répondu « casse toi ». Un autre s’est plaint de la nourriture, elle a répondu « je m’en fous ». La gérante les accuse de dégrader le matériel de l’hôtel, sans fondement. Ces comportements visant à intimider les jeunes nous apparaissent relever de la maltraitance et du harcèlement, et sont d’autant plus graves qu’ils s’adressent à des personnes fragiles et démunies telles que les mineurs isolés et les autres publics précaires hébergés à l’hôtel Métropole. Nous vous rappelons également l’absence de visite des services de l’Aide Sociale à l’Enfance aux mineurs isolés résidant à l’hôtel, l’absence de suivi éducatif tant que les jeunes y sont hébergés, les difficultés d’accès aux soins et l’absence de bilan médical.
Depuis un an et demi, de nombreux mineurs sont venus informer l’ASE de l’ensemble de ces faits et des conditions déplorables dans lesquelles ils sont accueillis. Sans effet. Ils obtiennent en général comme réponse des services de l’Aide Sociale à l’Enfance que la gérante est chez elle, et que l’ASE ne peut rien faire. Lorsqu’ils insistent, ils reçoivent des réponses telles que « si tu n’es pas content, tu changes de département ». Les témoignages recueillis et les faits constatés se sont multipliés et sont issus de mineurs ayant été transférés par d’autres départements. Ces jeunes ont connu d’autres conditions d’accueil, et mettent en avant les conditions déplorables dans cet hôtel d’Eure et Loir. Nous vous demandons d’agir de toute urgence pour que plus personne ne soit accueilli à l’hôtel Métropole. Nous nous réservons le droit de mener toute action citoyenne qui nous paraîtra nécessaire.
Le Collectif 28 pour la régularisation des sans-papiers
Le Collectif Eure et Loir terre d’accueil.